Season preview 2016-2017 : Toronto Maple Leafs
Eastern Conference – Atlantic division
Le messie est en ville

Auston Matthews lors du camp de développement de Toronto, en juillet dernier. L’Américain, premier choix du repêchage est attendu comme un sauveur par les fans des Leafs. Il a les moyens de répondre à ces immenses espoirs.
Et si les fans les plus impatients de la ligue avaient appris les vertus de la lenteur? Brendan Shanahan et son front office all star (le DG Lou Lamoriello et le coach Mike Babcock, notamment) ont fait œuvre de pédagogie depuis leur arrivée aux commandes dans la ville reine. L’an dernier, les fans des Leafs ont vu leur équipe dépouillée de ses deux joueurs les plus bankable. D’abord Phil Kessel, au printemps précédent, envoyé à Pittsburgh contre plusieurs choix de repêchage et prospects. Puis, en fin de saison, le capitaine Dion Phaneuf a pris la direction d’Ottawa dans un échange spectaculaire, impliquant 9 joueurs). Pour les Leafs, l’intérêt était surtout de se débarrasser du lourd contrat de Phaneuf, et de dégager ainsi une nécessaire flexibilité salariale. Toronto a aussi, clairement, mené une stratégie d’accumulations d’assets. Plusieurs joueurs signés en début de saison pour un an ont ainsi été échangés en cours de saison, afin de récupérer des choix de repêchage (Daniel Winnik, Roman Polak, Nick Spaling, Shawn Matthias, notamment). Une stratégie intelligente à moyen terme, d’autant qu’elle a permis à plusieurs jeunes espoirs de l’organisation de se frotter à la grande ligue l’an dernier. Mais une stratégie qui, en d’autres temps, aurait soulevé l’ire des fans des Leafs.
Clairement, le message est passé, Toronto va prendre le temps nécessaire pour construire une équipe capable d’aspirer à la coupe Stanley. Et si le chemin jusqu’au trophée reste encore long et incertain, Mike Babcock devrait dès cette saison commencer à toucher les dividendes de la stratégie torontoise. Car l’été a permis aux scouts de Toronto de s’offrir Auston Matthews, premier choix overall du dernier repêchage. Matthews est unanimement vu comme un futur centre numéro 1 de très haut niveau, une brique essentielle dans la construction du futur Toronto. Après un étrange suspense, il a paraphé son premier contrat avec l’organisation et devrait en toute logique débuter la saison avec le grand club.
Polak, le retourLamoriello a par ailleurs continué à se débarrasser des vétérans pour faire de la place à la nouvelle génération. Exit, donc, Brad Boyes, Mark Arcobello, Michael Grabner, PA Parenteau ou Raffi Torres, non reconduits. A l’inverse, quelques joueurs ont vu leur bail prolongé: Peter Holland (1 an, 1,3 M$), Martin Marincin (2 ans, 2,5 M$), Franck Corrado (1 an, 600 000$), Josh Leivo (2 ans, 1,225M$), les jeunes Dmytro Timashov (3 ans, 2,555M$) et Mitch Marner (3 ans, 5,325 M$) et surtout le binôme Nazem Kadri (6 ans, 27 M$) – Morgan Rielly (6 ans, 30 M$). Le DG des Leafs a également fait son marché avec trois joueurs autonomes: le défenseur Roman Polak, qui avait déjà commencé la saison précédente dans la métropole ontarienne (1 an, 2,25M$), Nikita Zaitsev, un arrière russe qui évoluait au CSKA Moscou (1 an, 1,775M$), et surtout le banger des Islanders, Matt Martin, gratifié d’un contrat généreux pour un joueur de ce type (4 ans, 10M$). L’idée est simple, donner un peu plus de maturité à un effectif qui en manque, et protéger les jeunes talents de l’organisation.
Et pour ce qui est de la rendre plus compétitive à court terme, la décision la plus importante du front office des Leafs est sans doute l’ajout de Frederik Andersen, échangé, concrètement, avec Jonathan Bernier, même si ce sont officiellement deux trades distincts. Le Danois est un véritable numéro 1, ce que ni Bernier, ni Reimer, n’avaient su être sur la durée à Toronto. De quoi redonner mettre un voile pudique sur une saison dernière difficile sur le plan des résultats (30e de la ligue), mais pas forcément dans le contenu. D’abord parce qu’avec 69 points, les Leafs ont fait (légèrement) mieux que la saison précédente, mais surtout parce que l’effet Babcock s’est fait sentir, avec une équipe beaucoup plus structurée et cohérente que lors des saisons précédentes. Toronto a ainsi encaissé 240 buts l’an dernier, soit 27 de moins que l’année précédente. Une baisse de 10% significative, qui doit continuer pour voir les Leafs redevenir compétitifs.
Trois gamins pour relancer l’attaque
Mais Toronto va aussi devoir faire un bond significatif en attaque, où le manque criant de talent du roster torontois a conduit à des statistiques peu reluisantes: 2,34 buts par match (28e attaque NHL), et un powerplay pathétique (15,4%, 29e de la ligue). Pour cela, Mike Babcock comptera sur un premier trio où James Van Riemsdyk devrait faire son retour. Le gros ailier américain était parti sur des bases intéressantes (14 buts et 15 passes en 40 matchs), avant de voir une fracture au pied gauche mettre un terme à sa saison. En santé, il est capable de chatouiller la barre des 30 buts et des 60 points. Il devrait évoluer avec Nazem Kadri, au centre, et Leo Komarov à l’aile droite. Le premier nommé est un petit playmaker rapide et créatif, qui a réussi, malgré le marasme ambiant, à scorer 45 points l’an dernier. Il paraît difficile d’attendre beaucoup plus de lui tant que la relève ne soulagera pas la première ligne. L’identité du troisième larron est d’ailleurs révélatrice. Komarov a connu de loin sa meilleure saison en carrière (36 points en 67 matchs). Rapide et accrocheur, Komarov n’est pourtant pas un véritable joueur top 6. C’est plus le manque de talent offensifs d’expérience qui lui vaut de figurer sur la première ligne des Leafs.
La deuxième unité devrait être celle d’Auston Matthews. Le jeune Américain, très mature, a choisi l’an dernier une voie originale en évoluant en Suisse, avec des adultes. Une décision qui pourrait l’aider à s’imposer rapidement en NHL. Grand, puissant, adroit, et intelligent, Matthews est le prototype du centre de premier trio dominant. Il n’a que 18 ans et la pression de Leafs nation sera immense, mais on peut légitimement s’attendre à une saison similaire à celle qu’a connu Jack Eichel l’an dernier avec Buffalo (24 buts, 56 points). Surtout si l’adaptation de son ailier droit au jeu NHL est rapide. Mitch Marner n’a en effet plus rien à apprendre en OHL, une ligue qu’il a dominée l’an dernier (il en a été élu MVP). L’ancien 4e choix overall de 2015 est un petit magicien, rapide, technique et hyper créatif, un peu à la manière d’un Patrick Kane. Il devra toutefois apprendre à se protéger, son gabarit le rendant vulnérable à ce niveau. Le trio sera complété par le vétéran Milan Michalek, un ailier gros format, responsable défensivement, mais sur le déclin, d’autant que les blessures l’accablent avec une déprimante régularité: depuis ses débuts NHL, le Tchèque n’a disputé qu’une seule fois l’intégralité d’une saison…
La troisième ligne devrait, elle, être pilotée par Tyler Bozak. Le centre américain reste sur une saison mitigée, du fait d’une blessure à la tête qui l’a limité à 57 matchs. Intelligent et travailleur, Bozak n’a toutefois pas brillé en l’absence de son habituel binôme, Phil Kessel. Il va devoir se relancer cette année. Il pourra dans cette optique compter sur un autre ailier de talent, le Suédois William Nylander. Le fils de Michael, ancien des Hawks et des Caps, a connu une superbe saison entre les Marlies, l’équipe AHL de Toronto (45 points en 38 matchs) et les Leafs (13 points en 22 matchs). C’est un attaquant brillant, rapide et technique, qui a les moyens de devenir un atout offensif de premier plan pour la franchise ontarienne. Mais il lui faudra sans doute passer par une phase d’apprentissage. L’avantage, c’est qu’il n’aura probablement pas à se poser la question de l’intimidation physique, puisque le troisième larron de ce trio pourrait bien être Matt Martin. L’ancien Islander est un ailier puissant et rugueux, qui menait la saison passée la catégorie des mises en échec (365 l’an dernier) et n’hésite pas à jeter les gants. Sur la quatrième unité, Mike Babcock pourrait aligner un autre jeune talent de l’organisation, Nikita Soshnikov, auteur d’une bonne saison AHL, et d’un passage convaincant avec Toronto en NHL (5 points en 11 matchs). Il devrait évoluer avec l’ancien des Capitals, Brooks Laich, un centre de caractère, mais qui est clairement sur le déclin, et Colin Greening, un autre role player. A moins que l’on ne revoie Josh Leivo, un jeune ailier gros gabarit qui a fait de bonnes choses l’an dernier. A noter que Toronto compte aussi trois éléments sur la liste des blessés à long terme, les attaquants Joffrey Lupul et Nathan Horton, et le défenseur Stéphane Robidas.
Derrière, c’est très (trop) jeune
L’expérience de Robidas ne ferait pourtant pas de mal à l’arrière-garde des Leafs. L’an dernier, Toronto devait faire avec la 24e défense de la ligue (2,93 buts encaissés par match), et ce malgré un PK très honorable (81,6% d’efficacité, 14e de la ligue). Cette année, sans Phaneuf, elle ne sera pas mieux outillée. Et ce même si Morgan Rielly est un joyau. Le petit défenseur originaire de Colombie britannique progresse avec une belle régularité. Solide défensivement, c’est surtout un remarquable puckmover. Il pourrait être associé à un autre arrière petit et rapide, Matt Hunwick, qui ne vaudrait pas mieux qu’un 5e ou 6e défenseur dans une équipe de haut de tableau. Sur la deuxième unité, on retrouve le talentueux, mais inconstant Jake Gardiner. Mobile et à l’aise avec le puck, Gardiner ne semble toutefois pas capable de s’imposer comme un défenseur numéro 1 ou 2, un rôle dans lequel beaucoup d’observateurs le projetaient il y a quelques années. Il pourrait évoluer avec Nikita Zaitsev, un arrière russe doué offensivement, qui compte notamment sur un excellent tir et a la réputation d’être un excellent passeur. Nommé sur la première paire de défenseurs lors du dernier mondial, Zaitsev jouait au CSKA Moscou, où il était un élément de base. A 25 ans, c’est un pari intelligent pour les Leafs. Enfin la dernière paire devrait associer un duo tchéco-slovaque. Le vétéran Roman Polak, d’abord, un arrière solide défensivement qui amène en outre une dimension physique intéressante. Et l’ancien Oiler Martin Marincin, une bonne pioche des Leafs dans un échange avec les Oilers l’été dernier, qui s’est imposé au fil de la saison. En cas de besoin, le puck mover Frank Corrado pourra s’insérer dans ce lineup défensif. L’ensemble manque à la fois de densité, de physique et d’expérience, même s’il y a du talent. Difficile, sans renforts, d’imaginer Toronto progresser de façon significative dans ce secteur de jeu. Autant dire que les gardiens des Leafs vont avoir du travail.
La bonne nouvelle, c’est qu’il ne faudra pas une énorme performance du duo Andersen-Sparks pour faire mieux que les stats des gardiens torontois de l’an dernier (90,4% d’arrêt, 23e de la ligue). L’essentiel de la responsabilité incombera tout de même au Danois. Un défi pour l’ancien des Ducks, gardien talentueux, mais qui n’a pas donné toutes les garanties en tant que numéro 1. Il faut dire qu’à Anaheim, il était sous la pression du talentueux John Gibson, l’un des futurs grands du poste selon tous les observateurs. Sa doublure, Garret Sparks a surtout pour titre de gloire d’avoir débuté sa carrière NHL par un blanchissage, un exploit jamais réalisé par un gardien des Leafs. Mais il n’a clairement pas le potentiel d’un numéro 1.
Le lineup probable
James Van Riemsdyk (#21) – Nazem Kadri (#43) – Leo Komarov (#47)
Milan Michalek (#18) – Auston Matthews (#63) – Mitch Marner (#84)
Matt Martin (#17) – Tyler Bozak (#42) – William Nylander (#39)
Colin Greening (#28) – Brooks Laich (#23) – Nikita Soshnikov (#41)
Josh Leivo (#32)
Matt Hunwick (#2) – Morgan Rielly (#44)
Jake Gardiner (#51) – Nikita Zaitsev (#22)
Martin Marincin (#52) – Roman Polak (#46)
Frank Corrado (#20)
Frederik Andersen (#31)
Garret Sparks (#33)
Coach: Mike Babcock
TORONTO
MAPLE LEAFS
Création: 1917
Anciens noms: Toronto Arenas, Toronto St. Patricks
Propriétaires: Maple Leaf Sports & Entertainment Ltd depuis 1931, présidé par Larry Tanenbaum.
Patinoire: Air Canada Center
Palmarès: 13 Stanley Cups (1918, 1922, 1932, 1942, 1945, 1947, 1948, 1949, 1951, 1962, 1963, 1964, 1967)
Equipe affiliée AHL:
Toronto Marlies
L’AN DERNIER
16e de la Conférence Ouest avec 69 points.
Meilleur pointeur: Nazem Kadri (45 points)
Meilleur buteur: P.A. Parenteau (20 buts).
Le joueur à suivre :
FREDERIK ANDERSEN
Exit Jonathan Bernier et James Reimer, le duo de goalies qui a souffert pendant plusieurs années devant le filet des Leafs. Le nouveau patron s’appelle Frederik Andersen. Le Danois a connu trois saisons intéressantes avec les Ducks, mais la franchise californienne avait depuis un moment fait le choix de confier à moyen terme son filet à John Gibson. Andersen était donc voué à quitter Anaheim. La bonne nouvelle pour lui, c’est qu’à Toronto, son statut de numéro 1 ne sera certainement pas contesté par Garret Sparks. Ce gardien grand format (6 pieds 4 pouces) va donc devoir prouver qu’il peut tenir ce rôle et rassurer une équipe jeune, et aux bases défensives pour le moins suspectes. Attention quand même, ses statistiques des deux dernières saisons n’étaient pas éblouissantes (91,4 puis 91,9 % d’arrêts l’an dernier, 14e de la ligue) avec des Ducks qui avaient pourtant la meilleure défense NHL. On attendra aussi de lui qu’il dispute une bonne soixantaine de parties, choses qu’il n’a jamais eu l’occasion de faire depuis ses débuts en NHL.
La relève :
EN AVANT TOUTE
Classement ESPN: 1er
La plupart des meilleurs espoirs des Leafs devraient rapidement passer au statut de joueur de l’équipe première, à commencer par le trio Nylander-Matthews-Marner. Mais d’autres espoirs intéressants sont dans le pipeline. A commencer par un trio d’attaquants talentueux, mais au gabarit modeste : le Finlandais Kasperi Kapanen (22e overall en 2014, choix des Penguins), le Suédois d’origine ukrainienne Dmitro Tymashov (125e overall en 2015) et Jeremy Bracco (61e overall en 2015). Citons aussi le très intense Carl Grundström (57e overall en juin), le gros centre défensif québécois Frédérik Gauthier (21e overall en 2013) ou le pari russe Igor Korchkov (31e overall en juin). En défense, c’est nettement plus mince. Tout juste citera-t-on l’ex de Pittsburgh, Scott Harrington (54e overall en 2011), un arrière two way au coup de patin fluide et Travis Dermott (34e overall en 2015), un défenseur offensif plutôt intéressant. Clairement, Toronto va avoir besoin de renfort en défense. Et malheureusement, le renfort ne viendra probablement pas de la promotion interne.
Le pronostic de TPPQB
Malgré les discours de circonstance, l’objectif l’an dernier s’appelait Auston Matthews pour les Leafs. IL est atteint. De là à espérer un changement radical de trajectoire, maintenant que Toronto a mis la main sur le joueur qu’il convoitait, il ne faut pas aller trop vite. Les Leafs sont talentueux en attaque, mais très jeunes, et insuffisants en défense. A moins que Frederik Andersen ne dispute une saison de rêve, c’est un nouveau printemps sans playoffs qui se prépare pour la grande ville ontarienne. Mais la démarche a bien été entendue par les fans, et le processus de reconstruction est en bonne voie. Attention à cette équipe dans 3-4 ans, surtout si elle parvient à renforcer sa défense dans l’intervalle.