Season preview 2016-2017 : Ottawa Senators
Eastern Conference – Atlantic division
Une ambition… prématurée ?

Le nouveau DG des Senators, Pierre Dorion (à gauche), a lancé son mandat embauchant l’entraîneur québécois Guy Boucher (à droite).
Douze ans après son arrivée chez les Senators en tant que coach, neuf ans après en avoir été nommé DG, Bryan Murray s’en est allé. On aurait souhaité une autre fin pour le natif de Shawville, au Québec, mais c’est la maladie qui l’a forcé à prendre du recul sur une carrière de près de 35 ans dans la NHL – il reste toutefois conseiller auprès des Sens. Murray, 73 ans, souffre en effet depuis plusieurs années d’un cancer incurable, et ses forces ne lui permettaient plus d’occuper la position exigeante de DG. Pour remplacer son homme de confiance, le propriétaire Eugene Melnyk a choisi son adjoint Pierre Dorion, qui avait auparavant occupé la fonction de directeur du personnel joueurs, et, onze ans durant, joué les scouts pour le Canadien de Montréal. « Nous avons un excellent noyau de joueurs, je pense sincèrement que, grâce au travail de Bryan, nous somme sur la bonne voie pour atteindre la Coupe Stanley », déclarait le nouveau patron lors de son intronisation. Cela ne l’a toutefois pas empêché de procéder à quelques mouvements d’importance.
A commencer par l’entraîneur, Dave Cameron, qui s’est vu signifier la fin de sa mission. Il faut dire qu’Ottawa a été médiocre, l’an dernier, terminant à 11 points des Red Wings, et de la dernière place en playoffs et surtout… à 14 unités que sa marque de la saison précédente. Pour le remplacer, Pierre Dorion a choisi le Québécois Guy Boucher, qui entraînait en Suisse après une première expérience plutôt réussie à Tampa entre 2010 et 2013. Boucher ne sera pas seul maître à bord, puisqu’il sera secondé par un autre coach expérimenté, Marc Crawford. Un choix qui interroge, même si Boucher est le head coach, on ne peut s’empêcher de se demander ce qui se passerait si les résultats n’étaient pas bons, avec un autre coach au pedigree NHL dans la maison…
Les Senators ont par ailleurs enregistré le départ de leur défenseur vétéran, Chris Phillips, qui a pris sa retraite après une saison entière ratée pour cause de problèmes dorsaux. Mark Fraser, Patrick Wiercioch et Alex Chiasson ont, eux aussi quitté le navire, alors que Chris Kelly, un ancien de la maison, signait pour un an et 900 000$. Mais l’on retiendra surtout de cette intersaison l’échange réalisé par Pierre Dorion, qui a envoyé Mika Zibanejad et un choix de deuxième ronde chez les Rangers en retour de Derick Brassard. Le Québécois est plus productif que le Suédois, mais aussi sensiblement plus vieux (29 ans, contre 23 pour Zibanejad). Il a un contrat plus long et plus lourd (encore 3 saisons avec un cap hit moyen de 5M$). Autant dire qu’à moyen terme, le deal risque d’être à l’avantage des New Yorkais. Mais à court terme, Brassard est un joueur supérieur. Cet échange indique donc qu’Ottawa se voit comme un candidat sérieux au playoffs (admettons), voire à mieux (sérieusement?). Curieuse auto-évaluation…
Hoffman retrouve Boucher
L’an dernier, les coéquipiers d’Erik Karlsson s’en sont plutôt bien sortis en attaque (9e de la ligue avec 2,8 buts par match), malgré un powerplay misérable (26e, 15,8% d’efficacité). Une faiblesse étonnante à un homme de plus au vu de l’effectif des Senators. Cette année, Ottawa comptera beaucoup sur Mike Hoffman, qui a prolongé son contrat de 4 ans (20,75M$). Un bon deal pour les Senators, car l’ancien des Voltigeurs de Drummondville a plus que confirmé sa belle saison 2014-2015 (29 buts, 59 points) malgré des rapports pas toujours simples avec son entraîneur, Dave Cameron. Cet ailier rapide et très adroit devant le filet adverse se révèle sur le tard. A 26 ans, il peut encore progresser, d’autant qu’il retrouve avec Guy Boucher un entraîneur qui l’avait coaché pendant deux saisons dans le junior, avec d’excellents résultats. Il devrait évoluer avec l’ancien Coyote Kyle Turris, un centre playmaker intelligent et doté d’un bon lancer du poignet. Turris reste sur une saison frustrante, où on l’a vu dominateur en début de saison, avant qu’une blessure à la cheville ne perturbe tout le reste de son exercice 2015-2016, ce qui explique une production offensive bien en deçà de ses standards (30 points). A sa droite, Mark Stone, un poil moins efficace que lors de sa saison précédente, a confirmé qu’il avait l’étoffe d’un attaquant de premier trio (61 points, dont 23 buts). C’est un bon passeur, qui dispose aussi d’un excellent lancer, et un joueur qui ne rechigne pas à aller batailler devant le filet. Il a en outre été excellent lors du championnat du monde (10 points en 10 matchs) avec le Canada.
Sur la deuxième unité, on devrait retrouver le nouveau venu Derick Brassard, un playmaker très adroit et subtil, qui patine avec aisance. L’an dernier, Brassard a connu sa meilleure saison en carrière en terme de buts inscrits (27). A 29 ans, il a encore devant lui plusieurs belles saisons. Il aura aussi pour mission de tenter de relancer Bobby Ryan, qui semble décliner année après année. L’ancien des Ducks avait pourtant connu un superbe début de saison, mais il a coincé à partir de décembre et a fini la saison avec 16 matchs sans but. Ce gros ailier, puissant et adroit, a clairement un problème de confiance depuis quelques saisons. Clarke MacArthur, lui, a sans doute surtout été perturbé par une commotion cérébrale qui lui a fait rater 18 matchs. Mais sa saison reste décevante en comparaison de l’exercice précédent (de 56 à 36 points). C’est un ailier créatif, qui se déplace avec agilité mais a semblé plus réticent à entrer dans les zones de trafic l’an dernier qu’à l’accoutumée. Il semble pourtant évident que c’est en reprenant ses bonnes habitudes qu’il retrouvera un niveau de scoring plus conforme à son potentiel.
Zach Smith, l’improbable buteur
Sur la troisième unité, on devrait retrouver deux joueurs qui sortent de saisons exceptionnelles, Zach Smith et Jean-Gabriel Pageau. Le premier, plutôt vu comme un grinder jusqu’à présent, a connu une explosion offensive inattendue, inscrivant 25 buts (et 36 points), alors qu’il n’avait jusqu’alors jamais atteint les 15 buts. Une explosion qui a tout même peu de chances d’avoir des suites: l’an dernier, Smith shootait à 20,7% de réussite, soit plus du double de sa moyenne en carrière (10,2%). Un pourcentage qui le classe au tout premier rang de la ligue pour les joueurs ayant tiré au but au moins 100 fois dans la ligue, le genre de statistiques quasiment impossible à reproduire. Mais Smith, s’il continue d’être utilisé dans un rôle offensif, pourrait être un contributeur un peu plus solide que par le passé. Jean-Gabriel Pageau, lui, disputait, à 23 ans, sa première saison complète dans la ligue. Et le Québécois a fait une belle impressionavec 43 points, doublant sa production de la saison précédente. Ce tout petit gabarit rapide, adroit et teigneux s’est révélé d’une efficacité redoutable en désavantage numérique, situation dans laquelle il a inscrit 7 buts et 9 points, deux catégories dans lesquelles il était tout simplement le meilleur de la ligue. Reste à voir s’il sera aussi efficace si Guy Boucher ne l’utilise que sur sa troisième ligne. Curtis Lazar, enfin, a dû terminer la saison frustré. Confiné dans des rôles subalternes, le plus souvent aux côtés du fruste Chris Neil, et privé de temps sur le PP, l’espoir offensif numéro 1 de l’organisation a eu bien du mal à produire (20 points). Dommage, car ce gros compétiteur, rapide et intense, a le potentiel pour apporter beaucoup plus. On surveillera donc avec attention la façon dont Guy Boucher l’utilisera.
Le quatrième trio sera, lui, confié à Chris Kelly, de retour de Boston. Ce centre défensif fiable et expérimenté doit apporter du leadership et de la maîtrise à l’attaque des Senators. Il pourrait évoluer avec le vétéran enforcer Chris Neil et le gros ailier ou centre two way Nick Paul, auteur d’un passage plutôt convaincant avec le grand club en fin de saison. A moins que Ryan Dzingel, un ailier rapide, mais au potentiel offensif limité, ou Matt Puempel, un sniper qui peine à s’établir au niveau NHL pour le moment, ne trouvent le moyen de s’installer dans le lineup.
Karlsson, toujours plus fort
Ce qui est sûr, c’est que pour retrouver les playoffs, le rendement défensif des Senators va devoir sérieusement s’améliorer. L’an dernier, Ottawa avait la 26e défense de la ligue (2,94 buts encaissés par match), avec un PK franchement pathétique (75,8% d’efficacité, 29e de la ligue). Difficile dans ces conditions d’envisager un retour en playoffs. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’Ottawa a sensiblement renforcé sa défense avec Dion Phaneuf (lire ci-contre), qui donnera, avec Cody Ceci, un top 4 de bonne facture à l’équipe de la capitale canadienne. Ceci s’est établi l’an dernier comme un solide arrière top 4, gros, mobile et à l’aise avec le puck sur sa palette. De quoi obtenir un contrat de deux ans et 5,6M$. Son association avec Phaneuf était prometteuse l’an dernier, et l’on peut légitimement s’attendre à ce que le duo progresse à mesure qu’il se découvre et gagne en complicité. Cette deuxième paire viendra appuyer celle qui associe Erik Karlsson à Marc Methot. Karlsson a une nouvelle fois produit une saison de très haut niveau, qui aurait dû, pour beaucoup d’observateurs, lui valoir un nouveau trophée Norris. Dominant offensivement comme peu d’attaquant le sont aujourd’hui (82 points, quatrième scoreur de la ligue), le Paul Coffey des années 2010 dicte le rythme à sa guise grâce à sa remarquable qualité de patinage et à son intelligence de jeu. Il fonctionne parfaitement avec son partenaire Marc Methot, dont le jeu physique et défensif complète à merveille celui de Karlsson.
Un challenge pour les gardiens
Sur la troisième paire défensive, on retrouvera Mark Borowiecki, un arrière dont le front office des Sens apprécie le jeu physique, mais qui a un potentiel offensif quasi inexistant. Il devrait être associé soit à Chris Wideman, un arrière offensif, soit avec Patrick Sieloff, patineur agile et amateur de grosses mises en échec, soit avec le limité Mike Kostka. La meilleure solution, toutefois, serait plutôt que Thomas Chabot se taille un poste lors du camp d’entraînement. Le premier choix des Sens lors du repêchage 2015 a connu une très belle saison avec St John’s en LHJMQ. Ce puckmover rapide et élégant manque un peu de muscle, mais il a le talent pour contribuer très vite en NHL.
Devant le filet, la saison dernière a été sans grande surprise. Comme attendu, Andrew Hammond n’a pas été capable de répéter ses miracles de la saison précédente. Comme attendu, Craig Anderson a donc disputé 60 matchs l’an dernier, se montrant souvent solide, sans toutefois écarter les critiques quant à son manque de régularité. Avec à la clef des statistiques sans relief (91,4% d’arrêts, 2,78 buts encaissés en moyenne par match. Surtout, il a encaissé 51 fois la saison dernière le premier but… L’avenir de la franchise ne passe sans doute ni par lui, ni par Hammond. On imaginait qu’il passait par le jeune Matt O’Connor, mais ses débuts NHL, et même son passage en AHL avec Binghamton ont été moyens.
Le lineup probable
Mike Hoffman (#68) – Kyle Turris (#7) – Mark Stone (#61)
Clarke MacArthur (#16) – Derick Brassard (#10) – Bobby Ryan (#6)
Zach Smith (#15) – Jean-Gabriel Pageau (#44) – Curtis Lazar (#27)
Nick Paul (#13) – Chris Kelly (#22) – Chris Neil (#25)
Ryan Dzingel (#43)
Marc Methot (#3) – Erik Karlsson (#65)
Dion Phaneuf (#2) – Cody Ceci (#5)
Mark Borowiecki (#74) – Chris Wideman (#45)
Michael Kostka (#21)
Craig Anderson (#41)
Andrew Hammond (#30)
Coach: Guy Boucher
OTTAWA SENATORS
Création: 1992
Propriétaires: Eugene Melnyk depuis 2003
Patinoire: Canadian Tire Center
Palmarès: Aucun (même si une première version de l’organisation a gagné 11 coupes Stanley dans les années entre 1903 et 1937, avant de disparaître)
Equipe affiliée AHL:
Binghamton Senators
L’AN DERNIER
11e de la Conférence Est avec 85 points.
Meilleur pointeur: Erik Karlsson (82 points)
Meilleur buteur: Mike Hoffman (29 buts).
Le joueur à suivre :
DION PHANEUF
Depuis son arrivée à Toronto, l’ancien des Flames s’escrimait à assumer un rôle de défenseur numéro 1 qui ne lui convenait pas. Echangé en cours de saison à Ottawa, il évoluera sur la deuxième paire, avec Cody Ceci, derrière l’inamovible duo Karlsson-Methot. Une position plus confortable qui devrait lui permettre de démontrer qu’il reste un bon défenseur NHL, capable à la fois de scorer et d’imposer son potentiel physique. S’il y parvient, les Senators pourront compter sur un top 4 solide, et espérer s’améliorer de façon significative.
La relève :
COLIN WHITE, UN NOUVEAU BERGERON ?
Classement ESPN: 16e
Sans être parmi l’élite de la ligue, la banque d’espoirs des Senators commence à être intéressante. En défense, Thomas Chabot (18e overall en 2015) est un solide espoir, qui a sans doute encore pas mal de détail à régler, mais qui a confirmé son potentiel l’an dernier avec Saint John. Andreas Englund (40e overall en 2014) est, lui, un arrière physique gros gabarit que l’on devrait voir en NHL sous 2 à 3 saisons. Colin White (21 e overall en 2015), est un de espoirs de la cuvée 2015 qui a le plus progressé. Ce centre two way s’est attiré de flatteuse comparaisons à Patrice Bergeron. Logan Brown (11e overall en juin), est sans doute un projet à plus long terme, mais ce centre gros gabarit est un excellent playmaker et a été comparé à un autre ancien des Bruins, Joe Thornton. Le fils d’Ulf Dahlen, Jonathan (42e overall en juin) devra améliorer son coup de patin, mais c’est un marqueur au potentiel intrigant. On n’en dira pas autant d’un autre sniper, Matt Puempel (24e overall en 2011), dont la carrière stagne dangereusement. Enfin, devant le filet, Matt O’Connor a connu une première saison pro très compliquée, mais conserve un potentiel intéressant.
Le pronostic de TPPQB
On a quelque peu sursauté en apprenant que les Sens avaient cédé Zibanejad pour obtenir Brassard. Cette équipe semble loin du compte pour lutter pour la Coupe Stanley. En attaque, il y a de la profondeur, même si certains auront du mal à répéter leurs performances de l’an dernier (Smith) et si d’autres semblent sur le déclin (Ryan), et l’arrivée de Phaneuf devrait solidifier la défense. Mais l’ensemble manque d’expérience, et un peu de personnalité. Sans parler de ses gardiens, qui ne font pas partie de l’élite de la ligue. A priori, peu de chances donc de revoir les Senators en playoffs dès cette saison. A moins que Guy Boucher, motivateur de première force, n’actionne les bons leviers.