Season preview 2017-2018 : Colorado Avalanche
Western Conference – Central division
Un champ de ruines

Nathan MacKinnon a été l’élément le moins décevant d’une franchise qui a sombré l’an dernier dans une médiocrité inédite. Une saison dont on ne sort vraisemblablement pas indemne.
Difficile d’imaginer équipe aussi talentueuse et médiocre à la fois que Colorado. Bardée de hauts choix au repêchage, capable, le temps d’une saison, la première de Patrick Roy, de donner le change en remportant sa division, l’équipe de Mile–High City affiche pourtant une médiocrité confondante depuis trois ans. L’an dernier, cette médiocrité a atteint des niveaux insoupçonnés. Consulter les statistiques de l’équipe de Jared Bednar l’an dernier, c’est le plus souvent lire les classements par le bas : dernière attaque (2,01 buts par match), dernière défense (3,37 buts encaissés par match), dernier powerplay (12,6% d’efficacité), avant dernier PK (76,6%), 27e pour le différentiel de tirs moyen (-3,6 par match)… et évidemment bon dernier de la ligue, avec 21 points de retard sur l’avant-dernier, Vancouver, et… 46 sur les playoffs. Pour retrouver ces derniers, Colorado (48 points) aurait tout simplement dû doubler sa récolte de points l’an dernier…
Un désastre en partie dû aux blessures qui ont touché la franchise l’an dernier et affecté deux piliers, le défenseur Erik Johnson (36 matchs manqués du fait d’une blessure au genou), et le gardien Semyon Varlamov, touché lui à l’aîne et qui a dû mettre un terme à sa saison mi-janvier. Mais cela n’explique pas tout. «Je pense qu’en temps que groupe, nous devons mûrir encore un peu plus, estimait ainsi Erik Johnson cet été. Cela commence avec les plus expérimentés, et le leadership qui doit s’assurer que tout le monde est irréprochable.»
Le feuilleton Matt Duchene
La saison a en outre été empoisonnée par les rumeurs de transactions autour de Matt Duchene. Le centre ontarien a connu sa pire campagne depuis cinq ans sur le plan statistiques, et, s’il a affirmé avec constance que les rumeurs ne le perturbaient pas, il est permis d’en douter. La situation semble d’autant plus complexe que le GM Joe Sakic maintient une ligne inflexible quant à ses demandes en retour de Duchene. Il souhaiterait un défenseur de haut niveau, un choix de première ronde, et un ou deux autres assets. Un prix exorbitant qui a fait reculer tous les concurrents. Au point que Sakic semble désormais déterminé à garder son attaquant au moins jusqu’au début de saison. La position est compréhensible du point de vue du dirigeant, mais pour le joueur, clairement déstabilisé, c’est intenable à moyen terme. Et le risque existe que Duchene s’enfonce dans le doute plus encore, et que sa valeur chute davantage.
En attendant de résoudre cette inextricable situation, Sakic n’est pas resté inactif cet été. Il a ainsi fait l’acquisition, en retour d’un choix de quatrième ronde en 2019, de Colin Wilson , dont l’inconstance avait fini par lasser Nashville, par ailleurs soucieux d’économiser les près de 4M$ de son contrat. Il a également œuvré sur le marché des free agents, avec pour principale prise le gardien québécois Jonathan Bernier (1 an, 2,75M$), qui vient remplacer Calvin Pickard, récupéré par Las Vegas lors du repêchage d’expansion, et l’ailier russe Nail Yakupov (1 an, 875 000$). Pour le reste, ce sont surtout des joueurs de complément qui sont arrivés: les défenseurs David Warsofsky (2 ans, 1,35M$) et Jesse Graham (1 an, 650 000$), le gardien Joe Cannata (1 an, 650 000$), et l’ailier Andrew Agozzino (2 ans, 650 000$). Sakic a également prolongé Sven Andrighetto (2 ans, 2,8M$), Matt Nieto (1 an, 1M$), et les minor leaguers Rocco Grimaldi (1 an, 750 000$), Duncan Siemens (1 an, 750 000$), Felix Girard (1 an, 650 000$) et Gabriel Bourque (1 an, 750 000$). Sur le plan des départs, plusieurs éléments ont été libérés, parmi lesquels on retiendra Fedor Tyutin, Eric Gélinas, Patrick Wiercioch et René Bourque. C’est également le sort qui a été réservé à l’ancien grand espoir russe Mikhail Grigorenko, qui a dans la foulée signé en KHL, avec le CSKA Moscou. Beaucoup de mouvements, mais vraisemblablement pas de quoi relancer une équipe à l’arrêt.
Rantanen, la bonne surprise
En attendant un échange de Matt Duchene qui pourrait bousculer les choses, si progression il y a cette année – et vu d’où part cette équipe, il est difficile d’imaginer qu’elle fasse pire – elle viendra donc en interne. Et il faut bien reconnaître qu’en attaque, l’Avalanche a du matériel de qualité. A commencer par un premier trio jeune, rapide et talentueux piloté par Nathan MacKinnon.
L’ancien des Mooseheads d’Halifax a surnagé dans le marasme l’an dernier, passant le palier des 50 points pour la deuxième saison d’affilée. Cet attaquant au patinage foudroyant doit toutefois faire mieux. Mais il est difficile de briller dans une équipe à la dérive. Il devrait évoluer avec le jeune Mikko Rantanen, la bonne surprise de la saison dernière. Le Finlandais a passé l’essentiel de sa première saison nord-américaine en NHL, où il a fait valoir son solide gabarit et son très bon tir, pour récolter 20 buts, ce qui est loin d’être anodin pour un rookie. Au point que les insiders disaient au printemps qu’il était avec McKinnon le seul joueur intouchable de l’effectif de Colorado. Le troisième larron de cette ligne pourrait être le jeune Suisse Sven Andrighetto, acquis de Montréal, où il peinait à se faire une place, en cours de saison dernière. Plus utilisé par Jared Bednar que par Claude Julien, il a tout de suite trouvé sa place et apporté une intéressante contribution offensive (15 points en 19 matchs).
Sur la deuxième unité, on devrait retrouver Matt Duchene, à l’aile ou au centre. Le pivot canadien doit retrouver ses esprits cette saison. Il devrait évoluer avec le capitaine Gabriel Landeskog, un ailier talentueux, qui a aussi connu une saison délicate, et aussi fait l’objet de rumeurs de transactions. Le duo ne manque pas de qualités, mais pour une raison inconnue, ne paraît pas bien fonctionner ensemble. Espérons que la méforme qui affecte les deux attaquants ne contaminera pas le talentueux Tyson Jost, un centre canadien très intense qui devrait débuter la saison avec Colorado.
Le troisième trio devrait, lui, héberger deux des nouveaux visages de l’organisation, l’Américain Colin Wilson, et le Russe Nail Yakupov. Le premier, on l’a évoqué plus haut, a fini par lasser ses patrons à Nashville. Brillant voici deux saisons en playoffs (13 points en 15 matchs), il n’a jamais su amener la même chose sur la durée en saison régulière. Un nouveau départ pourrait lui permettre de développer enfin son gros potentiel. Car Wilson est gros, puissant, rapide, et dispose d’un bon tir. Pour Nail Yakupov, on n’en espère sans doute plus autant. L’ancien premier choix overall en 2012 a fini par être échangé par Edmonton, mais St. Louis, qui l’a récupéré, n’a pas jugé bon de le conserver après une saison anonyme (de plus), ou on l’a seulement vu une quarantaine de matchs, avec un temps de glace minimal. Pour lui, cette saison est celle de la dernière chance avant le retour en Russie. Le trio sera complété par le costaud Carl Söderberg, qui a complètement disparu offensivement, passant de 51 à… 14 points. Enfin, le quatrième trio devrait héberger le jeune et rapide JT Compher, associé à un autre excellent patineur, Blake Comeau, et le scoreur d’appoint Matt Nieto. A moins que Joe Colborne ne ressorte du néant où l’a plongé son abyssale saison dernière (8 points, après en avoir inscrit 44 la saison précédente).
Une défense insuffisante
En défense, à l’inverse de l’attaque, on ne peut pas dire que l’Avalanche déborde de talent. Erik Johnson, de retour de blessure est un arrière de bon niveau, à sa place sur un premier binôme défensif. On n’en dira pas autant de Mark Barberio, qui pourrait lui être associé. Le Québécois n’est pas un mauvais joueur, il est capable de bonnes choses en zone offensive notamment, mais sa place est sans doute, au mieux, sur une troisième paire.
Le deuxième duo devrait associer le Russe Nikita Zadorov à Tyson Barrie. Le premier est un arrière gros format, capable de jouer dans les deux sens de la patinoire, mais qui manque encore de maîtrise au niveau NHL. Il a en outre été blessé longtemps l’an dernier, ce qui a limité sa présence à 56 matchs. Des rumeurs l’ont même envoyé en KHL cet été, mais il semble qu’elles étaient erronées. Quant à Tyson Barrie, c’est un puck mover typique de l’époque en NHL, rapide, adroit, et fort dans la zone adverse, mais qui n’est pas toujours irréprochable dans sa zone. Il sort d’une année correcte mais l’a conclue par des Mondiaux réussis… jusqu’à ce qu’il se blesse à la jambe. La poisse, décidément, ne quitte pas les joueurs de l’Avalanche, même sous un autre maillot.
Enfin la troisième paire défensive devrait être pilotée par le défensif Chris Bigras, un des rares arrières intéressants repêchés par Colorado depuis quelques années (draft 2017 mise à part). L’identité de son partenaire reste difficile à déterminer. Parmi les candidats, citons le Suédois Anton Lindholm, le russe Dmitri Mironov ou le nouveau venu David Warsofsky. Aucun de ces joueurs n’a un pedigree NHL, et l’on ne serait pas surpris de voir Joe Sakic aller chercher un vétéran pour donner un peu plus de consistance à sa blueline. Dans l’attente d’un tel mouvement, l’arrière garde de Colorado paraît bien faiblarde. A l’heure où nous écrivions ces lignes, le site de l’Avalanche indiquait que l’effectif ne comptait que quatre défenseurs NHL. Un constat certainement involontaire, mais pourtant d’une cruelle justesse.
Les gardiens auront donc du travail. Semyon Varlamov et son lourd contrat (5,9 M$ pour encore deux saison, est clairement sur la sellette. Car même avant sa blessure l’an dernier, le Russe était à la peine, comme en témoignent ses atroces statistiques : avec 3,38 buts encaissés en moyenne par match, il était tout simplement le pire gardien ayant disputé au moins 20 matchs, et son pourcentage d’arrêts de 89,8% était l’antépénultième… Jonathan Bernier (lire ci-contre) a donc clairement un coup à jouer pour devenir le véritable numéro 1 de la franchise. Pas sûr toutefois que ce soit un cadeau.
Le lineup probable
Sven Andrighetto (#10) – Nathan MacKinnon (#29) – Mikko Rantanen (#96)
Gabriel Landeskog (#92) – Tyson Jost (#17) – Matt Duchene (#9)
Colin Wilson (#34) – Carl Söderberg (#34) – Nail Yakupov (#64)
Blake Comeau (#14) – J.T. Compter (#37) – Matt Nieto (#83)
Joe Colborne (#8)
Mark Barberio (#32) – Erik Johnson (#6)
Nikita Zadorov (#16) – Tyson Barrie (#4)
Chris Bigras (#3) – Anton Lindholm (#54)
Semyon Varlamov (#1)
Jonathan Bernier (#45)
Coach: Jared Bednar
COLORADO AVALANCHE
Création: 1972 (WHA). Rejoint la NHL en 1979. Arrive à Denver en 1995.
Ancien nom: Nordiques de Québec
Propriétaires: Ann Walton Kroenke depuis 2015
Patinoire: Pepsi Center
Palmarès: 2 Stanley Cups (1996, 2001)
Equipe affiliée AHL:
San Antonio Rampage
L’AN DERNIER
14e de la Conférence Ouest avec 48 points.
Meilleur pointeur : Nathan MacKinnon (53 points)
Meilleur buteur : Mikko Rantanen (20 buts)
Le joueur à suivre : JONATHAN BERNIER
Une équipe dont le gardien numéro 1 déçoit, année après année. Un numéro 2 qui, après une opportunité ratée à Toronto, s’est retrouvé à Anaheim. Le timing de la rencontre entre l’Avalanche et Jonathan Bernier semble parfait. Le Québécois a connu une belle saison en Californie, prenant la relève de John Gibson à 39 reprises, avec des statistiques de bonne facture (91,5% d’arrêts, 2,5 buts encaissés par match, 15e de la ligue dans ces deux catégories). A ce niveau, il fera beaucoup de bien à l’Avalanche. Mais attention quand même, Bernier a failli lorsqu’il a dû jouer derrière une équipe médiocre en défense à Toronto. Ce qui est, et c’est un euphémisme, le cas de Colorado.
La relève :
UNE DÉFENSE ENFIN REGONFLÉE
Classement ESPN : 20e
Pour une équipe qui repêche régulière-
ment haut, Colorado n’affiche pas un prospect pool très reluisant. L’Avalanche était particulièrement mal équipé en défense, avec seul le défensif Chris Bigras (32e overall en 2013) comme espoir réellement prometteur. Mais la dernière draft devrait résoudre ce problème, avec la sélection du très mobile Cale Makar (4e), un gros accélérateur de jeu depuis le backend, et celle de Conor Timmins (32e), un autre puck moving defenseman très bon l’an dernier avec Sault Ste. Marie. En attaque, le centre Tyson Jost (10e en 2016) a le potentiel pour devenir un centre top 6 très complet et compétitif et a fait ses débuts NHL l’an dernier. Le centre US JT Compher (35e en 2013, choix de Buffalo), bien qu’embêté par les blessures ne devrait pas être loin non plus. Citons enfin l’ailier AJ Greer (39e en 2015), costaud en AHL, et qui a les moyens de jouer au niveau supérieur.
Le pronostic de TPPQB
Comment se remettre d’une saison désastreuse que l’an dernier ? Pour les joueurs de l’Avalanche, les playoffs sont un mirage. Cette équipe doit accepter de se reconstruire, et d’échanger certains éléments, comme Duchene, car le groupe actuel semble miné par le doute, et Jared Bednar, l’entraîneur n’a pas l’air de posséder la recette. Colorado devrait logiquement terminer parmi les cinq derniers de la ligue et récupérer un nouveau prospect de classe mondiale. Mais sans une équipe plus structurée et mature, tout le talent du monde ne suffira pas à remettre d’aplomb la franchise.