Season preview 2017-2018 : Canadiens de Montréal
Eastern Conference – Atlantic division
Moins d’atouts, plus de cohérence

Un an après le blockbuster qui l’a amené à Montréal en retour de PK Subban, Shea Weber doit toujours faire face à la comparaison avec l’ancien Montréalais. Pas de quoi ébranler le solide arrière.
Fin septembre, alors que le camp d’entraînement du Canadien tire à sa fin, le bilan comptable des matchs de préparation a créé une vague de pessimisme parmi les fans montréalais. L’équipe québécoise, sortie sans gloire au premier tour des playoffs par des Rangers portés par un Lundqvist stratostphérique (4-2), confirme-t-elle, en quelques sorties bâclées avec des équipes mixtes que l’été 2017 a considérablement affecté son potentiel ? On pourrait mettre ce sentiment sur l’irrationalité proverbiale de la fanbase montréalaise, mais ce serait oublier que Marc Bergevin a perdu gros cet été.
Alex Radulov, excellent l’an passé, a préféré les dollars de Dallas à ceux de Montréal. Pour le remplacer, Montréal a sacrifié son meilleur espoir, le Russe Mikhail Sergachev, envoyé à Tampa en retour de Jonathan Drouin. Un bon coup, a priori tant marketing que sportif. Par contre, le DG montréalais aura du mal à faire avaler aux partisans montréalais que laisser filer Andrei Markov pour quelques centaines de milliers de dollars et une année de contrat était la bonne décision.
Le vétéran russe laisse un trou béant sur le premier duo du CH, et la marge de manœuvre salariale gagnée dans l’opération ne sert pas à grand-chose si Bergevin ne conclut pas un autre échange. Karl Alzner, signé en tant qu’agent libre en provenance de Washington (5 ans, 23,125M$) est un solide arrière défensif, mais il remplace plutôt Alexei Emelin, repêché par Vegas. Quant à David Schlemko, obtenu des Golden Knights contre un choix de cinquième ronde, il n’a jamais prouvé avoir l’étoffe d’un arrière capable d’évoluer sur la durée sur un top 4. Nathan Beaulieu, un temps vu comme l’héritier de Markov, a lui été envoyé aux Sabres en retour d’un choix de troisième ronde. Quant aux autres recrues estivales en défense, elle n’ont rien de spectaculaire, que ce soit Mark Streit, dont la date de péremption semble bel et bien dépassée, le décevant Joe Morrow. Seul le Tchèque Jakub Jeřábek, solide en KHL, peut éventuellement, une fois adapté, donner un peu d’espoir. Mais là encore, le projeter comme un défenseur numéro 2 paraît bien ambitieux.
Quant à l’attaque, si l’on admet que Drouin remplace numériquement Radulov, elle semble à peu près du même calibre que l’an dernier. L’addition d’Aleš Hemský semble, au mieux, un pari sur un vétéran en fin de parcours. La vraie plus value viendra, s’il confirme, du jeune Québécois Charles Hudon, très bon lors du camp d’entraînement. Et peut-être du rebond de quelques éléments (Tomáš Plekanec, Alex Galchenyuk, Brendan Gallagher) qui peuvent faire mieux que l’an dernier.
Pour autant, le pessimisme ambiant semble exagéré. Montréal sort d’une très solide saison régulière, qui l’a vu remporter la division atlantique et encaisser 103 points. L’effectif demeure solide, avec le meilleur gardien de la planète, et un lineup dense. Surtout, le Canadien a récupéré, en fin de saison dernière, l’un des meilleurs coaches de la ligue avec Claude Julien. L’ancien pilote des Bruins a pu effectuer une préparation complète avec son équipe, et il devrait apporter une plus value sensible à cette équipe.
Galchenyuk est prêt à devenir un attaquant d’élite
Pour une équipe du top 10 de la ligue, Montréal marquait peu l’an dernier (15e attaque avec 2,72 buts par matchs), avec un powerplay toujours moyen (13e de la ligue avec 19,7% d’efficacité). Surtout, les playoffs ont accentué le trait, avec une production offensive nettement insuffisante (onze buts en six matchs). Une sécheresse qui mérite toutefois d’être relativisée, l’échantillon étant très limité, et la performance de Lundqvist spectaculaire.
Cette saison l’attaque québécoise devrait beaucoup reposer sur le premier trio composé de Max Pacioretty, Jonathan Drouin et Brendan Gallagher. Le premier demeure l’un des buteurs les plus réguliers de la ligue (35 buts l’an dernier, 6e saison de 30 buts lors des 7 dernières). Gros, puissant, Pacioretty s’appuie sur sa vitesse et son excellent lancer du poignet. Il perfectionne chaque année son jeu défensif, et a beaucoup mieux géré cette année le capitanat. Il a d’ailleurs pris Drouin sous son aile cet été pour l’aider à s’adapter à sa nouvelle équipe. Le Québécois sera très attendu cette année (lire ci-contre), d’autant qu’il devrait évoluer comme premier centre de la franchise, position hautement stratégique. Enfin Brendan Gallagher doit une revanche à ses fans. Le petit ailier a peiné l’an dernier, au points que certains ont pointé ses blessures aux mains comme rédhibitoires. Ce qui reste à prouver. Ce qui ne l’est pas, c’est que son jeu intense et son opiniâtreté, notamment quand il s’agit d’aller dans le trafic, sont essentiels au Canadien.
La deuxième unité pourrait, si l’on en croit le camp d’entraînement, être composée du trio Lehkonen-Plekanec-Hudon. Le centre tchèque sort de la pire saison de sa carrière sur le plan offensif (28 points), et a même été laissé exposé lors de l’expansion draft. Alors qu’il écoule la dernière année de son contrat, il doit rebondir et prouver qu’il peut redevenir ce centre rapide et très fort défensivement qui était une pièce importante du puzzle montréalais. Sa présaison a été convaincante, associé aux deux jeunes ailiers. Artturi Lehkonen a, lui, connu une superbe première saison NHL, inscrivant 18 buts et démontrant d’ores et déjà une grande maturité défensive. Doté d’un superbe lancer du poignet, le Finlandais peut vraisemblablement s’améliorer encore, et devenir une option fiable pour un top 6, avec un grand sens des responsabilités. Enfin Charles Hudon, ou plutôt la façon dont l’organisation gérait sa carrière, a longtemps été une énigme pour les fans montréalais. Le petit Québécois, intelligent, adroit et inspiré, était depuis plusieurs saisons l’un des attaquants les plus convaincants d’AHL, mais ses passages avec le grand club étaient rares et brefs, alors même qu’il trouvait presque toujours le moyen de scorer. Il a été le meilleur attaquant montréalais lors du camp d’entraînement, et semble mûr pour non seulement décrocher un poste, mais être d’emblée un contributeur offensif intéressant, un peu comme Lehkonen l’an dernier.
Lehkonen, le nouveau Gallagher?
On le voit, pas de place a priori sur le top 6 pour Alex Galchenyuk. L’Américain d’origine biélorusse a connu l’an passé une saison très compliquée. Il l’avait pourtant commencée au centre du premier trio, dans un scénario qui semblait ravir aussi bien les fans que l’organisation. Mais alors qu’il produisait avec constance, se classant dans le top 10 de la ligue, une déchirure du ligament externe du genou l’a mis sur le flanc. Et une fois sa longue absence passée, Galchenyuk n’a pas su ou pu retrouver son niveau. Ajoutez à cela des rumeurs sur une attitude hors glace un peu trop détendue, et l’on a entendu de nombreuses rumeurs d’un éventuel départ. Galchenyuk a toutefois resigné pour trois ans et 14,7M$, mais un camp d’entraînement moyen a relancé les rumeurs. On devrait le voir évoluer, à l’aile, avec Philip Danault, excellent l’an dernier alors que personne ne l’attendait. Le centre québécois est un joueur rapide et solide défensivement, qui a trouvé une niche l’an dernier sur le premier trio entre Pacioretty et Radulov. Son défi sera, cette année, de prouver qu’il peut produire offensivement même sans bénéficier des mêmes privilèges. Le trio devrait être complété soit par Paul Byron, l’une des belles surprises de l’an dernier, soit par Andrew Shaw. Le premier est un ailier tout petit gabarit, mais qui patine comme le vent et se crée régulièrement des opportunités intéressantes. De quoi inscrire 22 buts l’an dernier, ce qui n’est pas rien. Quant à Shaw, il a plutôt déçu l’an dernier pour sa première saison dans la métropole québécoise. Mais cet ailier intense et provocateur a les moyens de rebondir.
Le quatrième trio est plus flou. On devrait y voir Aleš Hemský, qui n’est plus le brillant attaquant d’hier, mais a développé la partie défensive de son jeu et pourrait être une solution intéressante en avantage numérique, associé peut-être au défensif Jacob De la Rose, qui a montré des signes intéressants en AHL en fin de saison, voire à Michael McCarron, un centre gros gabarit qui n’a pas encore trouvé la bonne recette au niveau NHL même s’il dispose de beaucoup d’ingrédients, Torrey Mitchell, un solide vétéran fourth liner, le rugueux mais limité Andreas Martinsen ou le nouveau venu Peter Holland.
Weber, le nouveau roc
La défense montréalaise était évidemment le point fort de l’équipe l’an dernier (4e de la ligue avec 2,41 buts encaissés par match, en dépit d’un PK sans relief (14e de la ligue avec 81,1% d’efficacité). Mais c’est aussi le secteur le plus ébranlé par l’été. Shea Weber demeurera son leader, dans un registre plutôt défensif, même si son énorme lancer lui permet de frapper régulièrement en avantage numérique (meilleur buteur de la ligue parmi les défenseurs dans cet exercice avec 12 buts. Puissant, rugueux, dur à à l’impact, Weber est une présence intimidante. Il privilégie un jeu simple et efficace, mais n’excelle pas pour transporter le puck. L’idéal serait donc de l’associer à un puck mover. Mais le candidat idéal tarde à s’imposer. David Schlemko pourrait être celui-ci, même si lui demander d’encaisser les minutes de Weber est sans doute trop difficile. L’ancien des Sharks s’est en outre blessé et a raté tous les matchs de présaison. Du coup, le poste pourrait revenir, presque par défaut, au très jeune Victor Mete, repêché au quatrième tour en 2016, et qui a fait écarquiller les yeux de tous les observateurs lors du camp d’entraînement. Patineur de haut niveau, calme et mature, il a la capacité d’accélération nécessaire, et pourrait, à terme, devenir un joueur dont le style se rapprochera de Torey Krug. Mais à court terme, son manque d’expérience et son petit gabarit demeurent des points d’interrogation majeurs.
La deuxième unité est celle qui soulève le moins de question. Depuis le début du camp d’entraînement, Claude Julien a régulièrement associé Jeff Petry à Karl Alzner. Le premier est un puckmover mobile et complet, qui manque sans doute un peu de constance et de dureté, mais tient tout à fait sa place dans un top 4. Alzner, lui, remplace numériquement Markov, mais son jeu solide et sans fioritures se rapproche plus de celui d’Alexei Emelin, la dose d’agressivité parfois excessive en moins. Son profil ne fait pas l’unanimité, notamment parmi les amateurs de statistiques avancées, mais, si la mayonnaise prend, les deux joueurs pourraient bien se compléter. Enfin, le dernier binôme devrait associer David Schlemko, une fois remis, à Jordie Benn. Schlemko est un arrière technique et intelligent, qui a prouvé avec New Jersey qu’il pouvait être plus qu’un numéro 5 ou 6. Quant à Jordie Benn, c’est un arrière sobre qui s’est imposé avec facilité depuis son arrivé à Montréal, plutôt défensif mais capable à l’occasion de placer un bon lancer. Il a toutefois connu un mauvais camp, soulevant quelques interrogations. En cas de défaillance, on devrait rapidement voir le petit puckmover tchèque, Jakub Jeřábek, qui doit toutefois s’adapter au jeu nord-américain, ou Brandon Davidson, en difficulté lors de la présaison.
Cette défensive présente, à l’évidence, moins solide et éprouvée que celle de la saison dernière. Des ajustements seront nécessaires, et on imagine mal Marc Bergevin ne pas rester attentif au marché des défenseurs. Mais même affaiblie, l’arrière garde du Canadien pourra compter encore cette année sur le meilleur filet de sécurité de la ligue, Carey Price. Le gardien originaire de Colombie Britannique n’a pas connu sa meilleure saison l’an dernier (5e de la ligue « seulement » à la moyenne de buts encaissés – 2,23 – et au pourcentage d’arrêts – 92,3), après un exercice 2015-2016 ruiné par les blessures. Mais il a montré, lors de la majorité de ses sorties, qu’il pouvait afficher le niveau d’excellence qui a fait de lui le meilleur gardien de la planète. Un scénario d’autant plus probable qu’il n’aura pas, cette année, de World Cup à disputer avant la saison, et qu’il a signé cet été un contrat à long terme qui le met définitivement à l’abri du besoin. Sa doublure devrait être l’Américain Al Montoya, solide l’an dernier dans ce rôle à l’exception d’une déculottée d’anthologie à Columbus (0-10). Il a toutefois paru à la peine lors du camp d’entraînement alors que le jeune Charlie Lindgren, brillant en AHL l’an dernier, se fait de plus en plus menaçant.
Le lineup probable
Max Pacioretty (#67) – Jonathan Drouin (#92) – Brendan Gallagher (#11)
Artturi Lehkonen (#46)- Tomas Plekanec (#14) – Charles Hudon (#54)
Alex Galchenyuk (#27) – Philip Danault (#24) – Andrew Shaw (#65)
Aleš Hemský (#83)- Jacob De la Rose(#25) – Paul Byron (#41)
Torrey Mitchell (#17)/Andreas Martinsen (#37)
Victor Mete (#53) – Shea Weber (#6)
Karl Alzner (#22) – Jeff Petry (#26)
David Schlemko (#21) – Jordie Benn (#8)
Brandon Davidson (#88)
Carey Price (#31)
Al Montoya (#35)
Coach: Claude Julien
CANADIENS DE MONTRÉAL
Création: 1909
Propriétaires: Famille Molson (présidé par Geoff Molson) depuis
Patinoire: Centre Bell
Palmarès: 24 Stanley Cups (1916, 1924, 1930, 1931, 1944, 1946, 1953, 1956,1957, 1958,1959, 1960, 1965, 1966, 1968, 1969, 1971, 1973, 1976, 1977, 1978, 1979, 1986, 1993)
Equipe affiliée AHL: Rocket de Laval
L’AN DERNIER
4e de la conférence Est avec 103 points. Vainqueur de la division Atlantique
Meilleur pointeur et buteur : Max Pacioretty (67 points et 35 buts).
Le joueur à suivre : JONATHAN DROUIN
A 22 ans, la carrière NHL de l’ailier québécois est déjà bien remplie, entre conflit avec sa direction à Tampa, réconciliation, brillants playoffs, échange à Montréal et signature d’un coquet contrat. Drouin est un des plus purs talents de la ligue, un playmaker de classe mondiale qui semble s’épanouir lorsque le niveau grimpe et qu’on lui fait confiance. Montréal compte sur lui pour devenir un élément clef de son attaque, tant à cinq contre cinq qu’en avantage numérique, où il excelle. Il devrait d’ailleurs commencer la saison au centre de la première ligne offensive du CH, position hautement stratégique. Il est aussi, c’est un élément important au Québec, la première star québécoise des Habs depuis Pierre Turgeon et Vincent Damphousse. Il devra toutefois corriger quelques lacunes défensives pour bien s’entendre avec Claude Julien.
La relève :
PLUS DE DENSITÉ QUE DE TALENT
Classement ESPN : 23e.
Le départ de Mikhail Sergachev a laissé un vide béant dans le prospect pool du Canadien. En défense, le meilleur espoir est désormais Noah Juulsen (26e overall en 2015), un arrière défensif très calme et mature. L’espoir le plus proche de la NHL est toutefois Brett Lernout (73e en 2014), un arrière rugueux convaincant en AHL l’an dernier. Victor Mete (100e en 2016), est lui un petit arrière très mobile qui a bien progressé avec London cette année en OHL. Enfin, Josh Brook, repêché en juin (56e) est un autre arrière à dominante défensive. En attaque, on espèrera, côté Montréal, que le très doué Nikita Scherbak (26e en 2014) prenne son envol. Le Russe a beaucoup de talent, mais manque de constance et d’implication défensive. Mike McCarron (25e en 2013) devrait, lui, se bagarrer pour une place dans le roster NHL de Montréal. Cet attaquant très gros format doit par contre démontrer qu’il peut être plus qu’un fourth liner. Quant à Jacob De La Rose (34e en 2013), un attaquant très au point défensivement, il semble être de retour sur le bon chemin après des débuts NHL sans doute trop précoces. Charles Hudon (122e en 2012), devrait lui aussi avoir sa chance en NHL cette année, sans un style tout en adresse et créativité. On attendra aussi de voir ce que donnent les deux centres repêchés en juin, le très solide Ryan Poehling (25e), grand et complet, mais dont le potentiel offensif est difficile à évaluer, et le petit, mais très talentueux Joni Ikonen (58e), qui a été comparé à son compatriote Artturi Lehkonen. Mais la plus grande force du Canadien se situe devant le filet, avec trois espoirs intéressants. Charlie Lindgren, recruté en tant qu’agent libre, était l’an dernier le MVP de St John’s, en AHL, quand Michael McNiven, un autre agent libre récupéré par Montréal, était l’an dernier le meilleur gardien de l’OHL. Zach Fucale (36e en 2013) a du souci à se faire.
Le pronostic de TPPQB
Après un été quelque peu déstabilisant, le Canadien n’a pas rassuré les sceptiques. Mais l’équipe demeure solide, avec un trio majeur Pacioretty-Weber-Price de très haute volée. Surtout, l’arrivée de Claude Julien, l’un des tout meilleurs coaches de la ligue, est la garantie d’une équipe structurée, capable de tirer le meilleur de son potentiel. Du coup, à TPPQB, on imagine bien Montréal résister encore un an ou deux à la montée en puissance de Toronto, et lutter avec Tampa pour la tête de la division atlantique. En playoffs, il faudra avant tout passer l’obstacle Tampa, qui donne beaucoup de fil à retordre à la franchise québécoise. Mais avec Price à son meilleur niveau, tout est possible, et tout résultat inférieur à une demi finale de conférence serait une déception. Surtout si Marc Bergevin utilise à bon escient les quelques 8M$ de marge salariale dont il dispose.